vendredi 3 février 2012

De l'enseignement professionnel en particulier et du corps des élèves en général


Arrêtons de vouloir  revaloriser  l’enseignement professionnel. Commençons déjà par lui donner de la valeur ! 
Il y a quelques jours, je faisais mes devoirs institutionnels : je réfléchissais au projet académique et je me disais que valoriser l’enseignement professionnel, ça devrait passer d’abord et avant tout par considérer ce qui y est enseigné en lui donnant du poids dès le collège au moins.
Il me semble qu’un élément-clef pour comprendre l’enseignement professionnel, c’est la prise en compte dans ce cadre de la  praxis  : les élèves n’y sont pas de purs esprits, ils ont aussi un corps (et pas seulement des mains) et ils apprennent à s’en servir. Cet éducation du corps pour le geste professionnel s'accompagne et s'articule avec une formation intellectuelle solide. Or, l’enseignement pour et par le corps a pratiquement disparu au collège. En technologie, les élèves ne fabriquent plus grand chose, sauf marotte du prof local. En musique et en arts plastiques, à cause de cette idée saugrenue d’ajouter une discipline nouvelle sans enseignant et sans horaire, les élèves ont de plus en plus de temps de cours consacrés à l’histoire des arts et de moins en moins à l’usage des mains, de la voix, du souffle. Il reste l’EPS, mais qui n’existe pas dans le socle commun si ce n’est pas à travers le drolatique « savoir nager ».
Bilan, si déjà, quand j’étais élève, il n’y avait pas beaucoup d’enseignements du collège qui formaient le corps, enseignaient le geste, désormais, il n’y en a pratiquement plus. Or, comment valoriser des enseignements qui n’existent que pour les élèves qui se retrouvent en filière de relégation ? Est-il idiot d’imaginer que le futur ingénieur ou la future diplomate ont aussi besoin d’apprendre les gestes du monter/démonter ; construire/déconstruire ; fabriquer, en somme ? Il me semble que cela leur serait aussi nécessaire que la culture générale pour nos concitoyens futurs électriciens ou coiffeurs. Bref, je crois qu’il serait temps de cesser de considérer nos enfants, les enfants de la République, comme de purs esprits éthérés et de leur rendre un corps. Ce me semble, en tout cas, un lieu de réflexion et d’invention fort pertinent, au moins pour le collège, y compris dans cette perspective de donner du sens à toutes les filières du lycée.

[Ce billet est une version légèrement corrigée d'un commentaire posté sur le blog de Vincent Peillon]